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Reconceptualiser le jeu sur toute la durée de la vie

Merci à Michelle E.E. Bauer, candidate au doctorat (Interdisciplinary Health Science, Université d’Ottawa), pour sa participation à ce texte.

 

Alors que la pandémie de la COVID-19 continue de nuire au bien-être physique et émotionnel des Canadiens de partout au pays, les conversations sur la meilleure façon d’aider les familles à traverser cette épreuve abondent. Le jeu à l’extérieur, s’il est fait sécuritairement (uniquement avec les membres de son foyer et en respectant les mesures de distanciation sociale par rapport aux autres), représente peut-être une occasion de soulager les familles de leur stress et de leur offrir légèreté, vitamine D et sens de la communauté durant cette période difficile.

Le jeu est défini comme étant toute activité librement choisie, joyeuse, spontanée et fondamentalement agréable (lien en anglais). Néanmoins, quand le sujet du jeu à l’extérieur est abordé, on y fait référence comme s’il s’agissait d’un échange de l’enfant, et non de l’adulte, avec son environnement extérieur. Le jeu est ancré dans la conscience de notre société comme étant uniquement pour les enfants ou par rapport à eux.

Or, il n’y aucune raison qui expliquerait pourquoi le jeu ne pourrait pas s’appliquer à tous, partout, et à tout âge. Le jeu à l’extérieur nous offre des occasions d’apprentissage sur notre environnement, et il est important pour le développement physique, mental et social (lien en anglais). En effet, tous, et partout, devraient avoir accès au jeu à l’extérieur sûr et amusant. Le jeu ne connaît pas de frontières. Ainsi, la question est : comment pouvons-nous reconceptualiser le jeu sur toute la durée de vie?

Pour reconceptualiser le jeu, il nous faut revisiter nos imaginaires sociologiques et possiblement remettre en question notre terminologie restrictive. Un enfant peut jouer en faisant des bonds avec des pierres sur un lac. Un adulte peut jouer lorsqu’il sort pour courir et décide de gravir une colline rocheuse. Un adulte plus vieux peut jouer en bondissant jusqu’à la boîte aux lettres. Ainsi, le jeu peut être vu sur toute la durée de la vie, mais probablement pas de la façon qui suit nos préconceptions voulant qu’il comporte des activités pour enfants.

Pour revoir notre conceptualisation du jeu, nous devons voir l’expérience du jeu comme étant mouvante (p. ex., il se peut qu’en vieillissant, nous n’aimions pas les mêmes activités), négociable (p. ex., les sentiments associés au jeu peuvent changer d’un moment à l’autre), et émotionnelle (p. ex., jouer implique des sentiments et des émotions qui découlent de la participation aux activités).

Voir le jeu comme étant mouvant signifie que notre appréciation du jeu peut changer. Par exemple, nous pouvons trouver la bicyclette très amusante lorsque nous sommes jeunes et trouver cela plus ennuyeux en vieillissant. Cette fluidité du jeu signifie que notre relation par rapport à celui-ci peut s’ajuster et qu’elle est négociable. Voir le jeu comme étant négociable implique que nous acceptions que nos sentiments par rapport à celui-ci peuvent changer à tout moment. Il se peut que nous commencions une activité pour nous rendre finalement compte que nous souhaitons faire autre chose. Un adulte plus âgé pourrait décider de partir en randonnée dans la forêt et finalement s’arrêter pour photographier un papillon. Le jeu n’est donc pas quelque chose auquel il faut rester « accroché » – si on n’aime pas ça, on peut changer d’idée. La spontanéité du jeu signifie que nous sommes constamment en train de négocier notre participation, ainsi que nos sentiments avant, pendant et après le jeu. Les sentiments comme le plaisir, la joie et l’enthousiasme devraient couler de source par rapport à notre engagement avec le jeu. Ils font partie de notre état affectif et la relation émotionnelle que nous entretenons avec certaines formes de jeu. Si nous sommes mécontents de ce que nous faisons, nous ne sommes probablement pas en train de jouer et souhaiterions envisager quelque chose de plus amusant. Pour certains, toutefois, il suffit de persister un peu, ce qui permet une transition vers le plaisir. C’est fluide. Un jeune adulte jouant au ballon avec ses amis pourrait se sentir stressé si le jeu devient trop compétitif et soudain avoir besoin de repos. Voir le jeu comme étant mouvant, négociable et émotionnel pourrait encourager les adultes et les plus âgés à s’engager dans le jeu à l’extérieur.

Le besoin de légèreté et de divertissement est bien visible sur les réseaux sociaux où, il y a moins d’une semaine, on ne présentait que des nouvelles négatives sur la pandémie. On ne compte plus les vidéos avec des Italiens jouant au tennis avec leurs voisins par leurs fenêtres (lien en anglais), des entraîneurs de conditionnement physique espagnols offrant des cours du toit d’un immeuble, des immeubles entiers de condo jouant au bingo (lien en anglais) du bord de leur fenêtre, criant « B-9 » à travers la cour, et la police colombienne donnant des cours de zumba sur leur balcon (lien en anglais). "Some Good News" (en anglais), avec le comédien John Krasinski, a été vu par des millions de personnes et, comme l’a fièrement mentionné M. Krasinski dans son dernier épisode, repris par des diffuseurs de partout dans le monde.

Au Canada, où il est encore permis d’aller dehors, encourager cette légèreté par le jeu à l’extérieur pour tous les groupes d’âge est peut-être ce dont les citoyens ont besoin pour demeurer en santé, heureux et en sécurité Durant cette période difficile.